MobiAlerte 103 – 1er mars 2023

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Les Hauts-de-France vont confier l’étoile d’Amiens à SNCF Voyageurs

Le premier lot de la région ouvert à la concurrence était aussi convoité par Transdev. Voici comment, selon nos informations, SNCF Voyageurs a convaincu Xavier Bertrand et ses équipes de lui faire confiance malgré les lourds dysfonctionnements de ces deux dernières années.


Après avoir gagné au sud (Marseille-Nice, il y a un an et demi), Transdev a perdu le nord. Et inversement pour SNCF Voyageurs, qui a cru en sa bonne étoile d’Amiens et sauvé une situation que d’aucuns considéraient comme compromise après deux années d’exploitation cahotique et de conflit ouvert avec l’autorité organisatrice régionale. Oui mais voilà, un appel d’offres dans les règles de l’art se joue avant tout sur la qualité technique et financière des réponses, et selon nos informations celles de l’opérateur historique ont convaincu la région Hauts-de-France, qui devrait notifier sa décision aujourd’hui. Après d’ultimes échanges et finalisations, c’est vers la fin du mois de mars que devrait être présenté en séance plénière du conseil régional un contrat d’exploitation de neuf ans avec SNCF Voyageurs.

L’étoile ferroviaire d’Amiens, c’est près de 17% du volume de la convention actuelle entre TER et les Hauts-de-France, soit 3400000 trains.kilomètres. C’est le premier des quatre lots soumis à la concurrence pour des mises en service d’ici fin 2028 ; suivront les dessertes parisiennes (fin 2026), l’étoile de Lille et le littoral (fin 2027) et le TERGV (fin 2028).

Un taux de régularité à 98,5% et une offre augmentée de 9,5%, pour un coût de 22€ au train/kilomètre!

Une question s’impose d’ores et déjà : comment l’opérateur historique a-t-il pu renverser la situation ? Depuis deux ans l’exploitation des TER connaît des dysfonctionnements majeurs, avec des retards et des suppressions de trains qui placent la région Hauts-de-France en dernière position dans les classements de régularité. Et Transdev, malgré les difficultés à recueillir les informations nécessaires à son offre, qui ont d’ailleurs conduit à prolonger de quelques mois le calendrier initial de la procédure, entendait bien réitérer sa belle performance de Marseille-Nice.

Selon nos informations, SNCF Voyageurs a tout chamboulé, avec une équipe dédiée qui a accepté dans son offre finale tous les désiderata de l’autorité organisatrice, notamment un taux de régularité à 98,5% et une offre augmentée de 9,5%, pour un coût de 22€ au train/kilomètre – contre 28 € aujourd’hui! Optimisation des trajets avec suppression d’une bonne partie des retours à vide, réorganisation de la production et des roulements autour d’un seul site de maintenance, rénové, à Amiens, meilleure utilisation des moyens matériels et humains : tout ce qui était difficile hier deviendra possible au SA 2025…

La région et son président Xavier Bertrand se féliciteront probablement d’avoir autant obtenu par la mise en concurrence, y compris parce que les dispositions introduites dans le contrat sont censées la garantir de promesses non tenues. Qu’on en juge : multiplication par quatre des pénalités, qui atteindront 5% du chiffre d’affaires (contre 1% aujourd’hui), et surtout possibilité de résiliation du contrat si le plafond des pénalités est atteint deux années de suite. De même les calculs de réfaction de charges pour offre non réalisée sont modifiés : depuis deux ans la suppression de centaines de trains aboutissait à des bénéfices record de la SNCF (18,5 millions d’euros de résultat net en 2021) !

«La SNCF s’est-elle moquée de nous depuis deux ans ?», réagiront certainement des élus et des usagers. De fait, la réponse de SNCF Voyageurs s’est spectaculairement adaptée à la fois aux exigences de l’autorité organisatrice et à la dynamique de son challenger Transdev. «Il faut gagner cet appel d’offres», nous confiait un cadre dirigeant de l’entreprise il y a quelques mois, pour des raisons quasi politiques et «identitaires». C’est fait. Reste maintenant à préparer le plus difficile, la transformation des conditions de l’exploitation pour le rendez-vous du SA 2025. On saura alors si le travail de remise en question de la SNCF nécessaire à sa réponse à l’appel d’offres s’est concrétisé dans les faits.


COMMENTAIRE

Années de vérité

Prise de court sur Marseille-Nice par la dynamique de Transdev, la SNCF a réagi en Hauts-de-France en améliorant continûment ses propositions et en convainquant ses interlocuteurs que demain ne ressemblera pas à hier. Vu le passif accumulé depuis deux ans, ce n’était pas gagné.

La suite non plus n’est pas gagnée. Si elle ne tient pas ses engagements, SNCF Voyageurs perdra en crédibilité non seulement en Hauts-de-France, qui joue le jeu d’une promesse de transformation radicale des performances de l’opérateur historique, mais partout en France, dans toutes les régions qui aspirent à une meilleure qualité de service à un meilleur coût. L’enjeu est identique pour Transdev… mais aussi pour SNCF Réseau et les AO, qui ont leur part de travail à réaliser afin de vraiment améliorer le service aux voyageurs.

Il en va de la crédibilité de la mise en concurrence. A Marseille comme à Lille, elle provoque une émulation des opérateurs, malgré des conditions d’accès aux informations pas assez transparentes ni rapides. Les autorités organisatrices obtiennent une amélioration des offres et des performances économiques. Mais la ligne de crête est étroite: l’ouverture se résume pour l’instant à un duel entre SNCF et Transdev. On verra bientôt la suite en Pays-de-Loire, en Grand-Est, en Ile-de-France… et en Hauts-de-France, avec les processus d’attribution de lots sur les dessertes parisiennes et l’étoile de Lille. G. D.


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