Mobitelex 180 – 21 avril 2017

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Mobitélex. L'information transport

La lettre confidentielle de Mobilettre

Thierry Guimbaud à VNF

Thierry-GuimbaudThierry Guimbaud était depuis 2011 directeur des services de transport au ministère de l’Environnement et du Développement durable. Il vient d’être désigné directeur général de VNF (Voies navigables de France), en remplacement de Marc Papinutti, qui devrait diriger le directoire de la société de projet du canal Seine-Nord, dont le conseil de surveillance, présidé par Rémi Pauvros, a tenu sa première réunion hier jeudi 20 avril

Pas simple quand on a œuvré plusieurs années au sommet de la DGITM de changer de travail – en assurant la tutelle des entreprises publiques et en suivant nombre de dossiers touchant à la concurrence, on se grille sur la plupart des postes, déontologie oblige. Du coup les gestionnaires d’infrastructures publics sont très attractifs pour les hauts fonctionnaires. En rejoignant VNF, Thierry Guimbaud réussit sa sortie du ministère et reste dans le domaine des transports qu’il connaît particulièrement bien – avant la DGITM, il avait été directeur de l’exploitation au Stif (syndicat des transports d’Ile-de-France).


Etat-SNCF: les contrats de performance sont signés

Le calendrier, serré, a été respecté, comme nous l’annoncions la semaine dernière: vote en conseil de surveillance de SNCF et conseils d’administration de SNCF Réseau et SNCF Mobilités les 18 et 19 avril *, puis signature avec Michel Sapin et Alain Vidalies hier jeudi 20 avril (notre photo).

MB-9 Cette signature des contrats de performance intervient malgré l’avis (non conforme) de l’Arafer, et malgré les vives critiques exprimées la veille par Hervé Maurey, président de la commission de l’Aménagement du Territoire et du Développement durable du Sénat, qui venait de recevoir Patrick Jeantet et Bernard Roman en audition (l’Etat pour cause de période de réserve avait décliné l’invitation à débattre).

Deux visions s’opposaient depuis plusieurs semaines sur ces contrats de performance, et plus particulièrement sur le plus important, celui avec SNCF réseau. Ses insuffisances (en matière de trajectoire de financement public, de consistance du réseau, d’indicateurs ou encore de précisions sur les gains de productivité) sont si criantes qu’il faut le revoir avant de le signer, disent les uns, y compris Gilles Savary, député PS. On ne peut pas nier ces insuffisances, disent les autres, mais une telle contractualisation est indispensable pour assurer de la sérénité à tous les acteurs industriels de la filière ferroviaire qui doivent investir sur le long terme (lire Mobitelex 179).

La résolution du secrétaire d’Etat l’a emporté. Alain Vidalies s’était fixé depuis deux ans de stabiliser la politique d’infrastructures ferroviaires, non seulement en insistant sur la sécurité du réseau, mais aussi en lui donnant des moyens et une visibilité supplémentaires, malgré les critiques de Bercy et de nombre d’acteurs déçus d’arbitrages au milieu du gué. Avant de quitter le boulevard Saint-Germain, il peut donc s’enorgueillir d’avoir tenu son engagement. Ce n’était pas gagné.

* Selon nos informations, les représentants de Régions de France (Philippe Richert au conseil de surveillance de SNCF, Michel Neugnot au conseil d’administration de SNCF Réseau) se sont abstenus, arguant notamment d’engagements insuffisants de l’Etat et de SNCF Réseau, et d’une inquiétude renforcée sur l’avenir des lignes UIC 7 à 9, voire 5 à 6. On a aussi noté, fait assez rare, plusieurs votes «contre» au conseil de surveillance de SNCF.


Poids lourds: les vertus
de la tarification électronique

Un réexamen de la directive Eurovignette (1999/62/EC) est au programme de la Commission européenne en mai 2017. L’étude que vient de produire «Transport & Environment»* sur les impacts économiques des péages poids lourds tombe donc à pic.

Fraunhofer ISI (Karlsruhe) et l’Université polytechnique de Madrid ont étudié pour l’organisation les impacts des systèmes de péages poids lourds en vigueur en Allemagne et en Espagne, deux pays à fort trafic marchandises. Le système complet et performant de la LKW Maut en Allemagne donne lieu aux observations les plus intéressantes. L’étude en présente ainsi les deux principaux avantages:

  • elle induit une meilleure performance du transport lui-même, car elle est dissuasive des parcours à vide. Or, aujourd’hui, près de 20% des camions circulent sans chargement sur les routes européennes.
  • elle contribue à l’amélioration de la qualité de l’air puisque les véhicules (Euro V et Euro VI) paient un péage moins élevé. En Allemagne, entre 2005 et 2009, sous l’effet de la taxe, la part des véhicules Euro IV et Euro V était alors passée de 2% à presque 62%.
  • Selon l’étude, la LKW Maut n’aurait en revanche pas d’effet notable sur les prix à la consommation dans la mesure où elle ne représenterait qu’entre 1 et 5% des coûts de production. Surtout, l’étude fait valoir que les systèmes électroniques de péages sont beaucoup plus performants que le système de vignette. Ils contribuent à diminuer les externalités et la congestion. De plus, ils génèrent un revenu conséquent pour la puissance publique, au point que la LKW Maut constitue la principale source de revenus du ministère fédéral allemand pour le transport et les infrastructures digitales: 4,34 milliards d’euros (sur 5,4 milliards) en 2014. Pour le budget de l’AFITF, ce ne serait pas mal, non?

    Où veut en venir «Transport & Environment»? Bien sûr, plaider pour qu’à l’occasion du réexamen de la directive on s’inspire des systèmes les plus performants. Et elle espère que son champ d’application sera également élargi aux cars et bus de passagers, et que la composante CO2 sera prise en compte. L’Eurovignette est une boîte à outils qui peut contribuer utilement à réduire les coûts externes du transport… à condition d’avoir la volonté de l’ouvrir et de s’en servir.

    * Créée en 1990, «Transport & Environment» est une association paneuropéenne sans but lucratif qui regroupe une cinquantaine d’ONG. Elle est notamment financée par la Commission européenne, mais aussi par Transport for London ou les ministères allemands et norvégiens de l’Environnement.


    RATP Dev teste le micro transit en Angleterre

    Lancé à la rentrée 2016 à Bristol, le service de micro transit domicile-travail 100% privé Slide s’étend désormais à de nouvelles zones (Brislington, Knowle, Totterdown, Emerson’s Green, Downend, Bromley Heath) pour offrir une alternative aux habitants que les transports publics ou les VTC n’avaient pas réussi à séduire.

    C’est Bristol (au sud-ouest de l’Angleterre) et son demi-million d’habitants qu’a choisi le groupe RATP Dev pour tester la technologie de la startup Sadam (lire Mobitelex 146) et ainsi propulser son offre de micro-transit domicile-travail baptisée «Slide». Padam, après avoir essayé de pénétrer le marché du micro transit parisien (avec une offre de nuit puis domicile-travail), s’était ensuite recentré sur un modèle B2B, préférant vendre son algorithme à des acteurs du transport. RATP Dev avait été le premier groupe à annoncer un partenariat, dès l’été 2016.

    A mi-chemin entre le transport public et les VTC. Différences essentielles: le confort et le prix

    Lancée à la rentrée 2016, l’offre domicile-travail Slide représente une nouvelle alternative pour les habitants de Bristol: les trajets sont réalisés dans de confortables vans Volkswagen de 9 places, équipés du wifi, à un tarif compris entre 4 et 7 rounds (entre 4,80€ et 8,40€) par trajet. Selon Coralie Triadou, Business Development Director Great Britain et Ireland pour Ratp Dev, «c’est un positionnement à mi-chemin entre le réseau de transport public, moins cher, aux alentours de 3,5 pounds (4,20€), mais moins confortable, et les VTC, plus confortable mais beaucoup plus onéreux jusqu’à 25 rounds (30€)». Quant à la réservation, tout se passe par son smartphone, ou l’utilisateur inscrit son lieu de domicile, de travail, avant de se voir proposer des «pick-up times» qu’il réserve à l’avance d’un simple clic.

    Pour le groupe RATP Dev, c’est aussi une bonne opération. Il connaît bien l’Angleterre pour y être solidement implanté (London United, Yellow Buses, Metrolink…). Le secteur dérégulé lui laisse une place à prendre, même sur un marché de niche. L’algorithme performant de Padam permet de proposer une offre innovante. Le recrutement de conducteurs sous licence VTC reste beaucoup moins contraignant que pour des conducteurs de bus. Bref, c’est l’occasion de se positionner sur ce nouveau marché et d’expérimenter en grandeur réelle… avant pourquoi pas d’essayer ce type de dispositif dans d’autres villes. Sophie Hassan, responsable innovations chez RATP Dev, indique d’ailleurs que «plusieurs collectivités seraient d’ores et déjà intéressées».

    Mais le groupe avance ses pions avec prudence, tellement l’équilibre à trois entre autorité organisatrice, opérateur et start-up sera difficile à trouver. Impossible, pour l’instant, de connaître les termes exacts du contrat qui lie Padam à Ratp Dev, ni les taux de remplissage de ses véhicules à Bristol, ni les collectivités intéressées par un tel dispositif. Seul chiffre communiqué: le taux de satisfaction, supérieur à 4,7/5 depuis le lancement.

    A Bordeaux, il n’y a pas que le tramway…

    Citiz, connue à Bordeaux pour son offre de véhicules en autopartage, déploiera dès le mois de mai une flotte de véhicules en free-floating. Grâce à ce dispositif, déjà déployé à Strasbourg et Toulouse, fini les bornes, l’utilisateur peut prendre et déposer son véhicule (presque) où il le souhaite. Désormais, entre les 60 véhicules partagés de Citiz, ses 20 «Yea» en free-floating et les 200 Bluecub disponibles en one-way, les Bordelais sont gâtés! D’autant plus que la capitale girondine, qui vient de connaître une hausse record de la pratique du vélo au premier trimestre 2017, avec une augmentation de près de 20% par rapport au premier trimestre 2016, va progressivement déployer son plan vélo. A la clé, la multiplication des stations de Vcub, mais aussi et surtout le développement du réseau cyclable.

    Le Stif, à fond sur les bus

    Depuis le début du mois de mars, pas une semaine sans que le Stif n’alerte la presse à propos d’un renforcement d’offre, d’une innovation ou d’une expérimentation touchant les bus franciliens: renforcement des bus Express en grande nocturne, développement du Noctilien, test du futur bus électrique d’Alstom etc. Cette semaine, deux annonces coup sur coup: des matériels à deux étages testés sur la ligne de bus Express 91-03, et le test d’une navette autonome sur l’esplanade du parvis de la Défense. C’est Keolis qui en assurera l’exploitation, avec du matériel Navya.

    Selon nos informations Keolis et Transdev se sont livré une féroce bataille de solutions et de prix pour obtenir l’exploitation de ce service grandeur nature, bien plus complexe et conséquente que le parcours de la navette RATP sur le pont Charles-de-Gaulle, entre les gares d’Austerlitz et de Lyon, puisqu’elle se déroulera au milieu de flux piétonniers et cyclistes. Valérie Pécresse, présidente du Stif et Patrick Devedjian, président de Defacto, l’établissement public qui gère La Défense, n’ont d’ailleurs pas lésiné sur l’effet d’annonce: c’est une «première mondiale», clament-ils. Même si elle est un peu particulière pour l’instant: les parcours exacts ne sont pas encore fixés, elle ne commencera qu’en juin, et l’absence de personnel à bord n’est prévue que pour une durée limitée.

    En matière de marketing politique aussi, l’innovation est permanente, même si elle obéit souvent à la loi générale, très sarkozyste, de la saturation de l’espace médiatique par les annonces redoublées. Vivement cet été que l’on puisse découvrir le comportement de ces six navettes en environnement perturbé!


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